Professionnels de santé mentale : quel “psy” choisir ?
Le vocable “psy” est un peu trompeur. Il y a en effet beaucoup de noms qu’on entend et qui s’appliquent aux professionnels en lien avec la santé mentale : psychothérapeute, psychiatre, psychologue, psychanalyste. Cela induit parfois une certaine confusion, parce qu’en fait, tout le monde n’a pas la même formation ni les mêmes compétences, et il est utile de s’informer avant d’aller consulter quelqu’un.
Le médecin psychiatre
Parmi les professionnels de la santé mentale, le psychiatre est un médecin qui a effectué 10 ans d’études dont six années de médecine suivies de quatre années de spécialisation en santé mentale (psychiatrie). Il délivre des soins par une approche médicamenteuse et/ou psychothérapeutique, ce qui veut dire que dans certains cas les psychiatres s’y connaissent très peu en psychothérapie et n’ont pas cette démarche. Pour ceux qui délivrent des soins dans le cadre d’interventions psychothérapiques, ils peuvent utiliser diverses techniques. Par exemple : psychanalyse, thérapies de groupe, de couple, de famille, thérapies cognitivo-comportementales, méthodes de relaxation, etc. Parmi les professionnels de santé mentale, le psychiatre est le seul habilité à prescrire des médicaments, notamment des médicaments psychotropes. Il n’a toutefois pas du tout la même formation que les psychologues, qui ont une formation de sciences humaines.
Les psychologues
Les psychologues ne sont pas des médecins, mais ils sont eux aussi très reconnus car diplômés d’une Université de Sciences Humaines ou d’une école habilitée par l’Etat, (l’Ecole de Psychologues Praticiens par exemple). Ils peuvent avoir des spécialités différentes, selon leur formation :
- le psychologue du travail : souvent au sein de l’entreprise, il est spécialisé dans l’étude des comportements liés au monde professionnel. Il peut par exemple accompagner des personnes qui rencontrent des difficultés dans le cadre du monde professionnel ; conflits, fatigue, burnout / burn-out (épuisement émotionnel au travail). Il peut aussi accompagner les personnes dans leurs démarches de recherche d’emploi (la reconversion, la formation, etc.) et participer au travail de gestion des ressources humaines.
- le psychologue scolaire : au sein d’une ou plusieurs écoles, il est spécialisé dans l’aide aux enfants qui rencontrent des difficultés psychologiques dans leur vie scolaire, et il travaille en partenariat avec les enseignants. Sa formation est de quatre ans et correspond à un Master 1, mais elle inclut un stage long au sein d’une classe pendant un an.
- le neuropsychologue : c’est un psychologue spécialisé dans les troubles cognitifs ; il est habilité à faire passer certains tests qui permettent d’identifier et d’orienter une personne.
- le psychologue du développement : c’est un psychologue spécialisé dans le développement de la personne, il travaille souvent dans un cadre de recherche.
- le psychologue social : c’est un psychologue spécialisé sur les comportements des individus au sein de groupes. Souvent chercheur, il peut être aussi intervenant dans certains cadres où des conflits apparaissent : entreprises, institutions, écoles.
- enfin, le psychologue clinicien : (voir paragraphe ci-après)
Un psychologue qui s’occupe du bien-être psychique : le psychologue clinicien
Le psychologue clinicien possède une formation orientée sur le soin psychique à la personne. Il est diplômé d’un DESS ou d’un Master 2 professionnel obtenu après cinq ans de formation théorique dans une université de Sciences Humaines et possède une formation pointue en psychopathologie et en psychanalyse, augmentée d’une expérience acquise aux cours de stages en institutions spécialisées auprès d’autres psychologues cliniciens. Le mot “clinicien” signifie au chevet du patient, c’est-à-dire avec une dimension de soin et de proximité, voire d’intimité. Il est formé à l’écoute individuelle, dans le respect de l’intégrité et de l’unicité de la personne humaine quel que soit son âge et sa situation personnelle.
Il est tenu de respecter le code de déontologie des psychologues (en savoir plus), et le numéro Adeli attribué par l’ARS (l’Agence Régionale de Santé) garantit à ses patients qu’il répond aux exigences de son titre.
Professionnel formé au diagnostic, il dispose d’outils spécifiques.
La profession de psychologue clinicien a hérité de la médecine un objectif diagnostique qui permet l’orientation des personnes vers des professionnels adaptés à leur situation, mais aussi une pratique à visée de traitement (clinique et thérapeutique) d’un état de souffrance.
Le psychologue clinicien dispose d’outils de compréhension de la psyché dont certains sont réservés à son usage exclusif : ainsi les médecins psychiatres, par exemple n’ont pas la formation permettant d’utiliser certains tests utilisés par les psychologues cliniciens. Par exemple, le psychologue clinicien est en mesure d’établir le bilan psychologique d’une personne, en général à des fins d’orientation de cette personne vers les structures ou les professionnels de la santé les plus adaptés.
Les psychanalystes
Les psychanalystes sont des professionnels organisés et rassemblés sous l’égide de sociétés qui ne sont pas habilitées par l’état, comme le sont au contraire les Universités. En effet, bien que dès son origine et sa théorisation (par le médecin neurologue viennois Sigmund Freud) la psychanalyse soit un savoir doublé d’une technique destinée à soigner des patients atteints de pathologies mentales et à les mener vers la guérison, elle peut aussi être vue comme une discipline de développement personnel. Mais il est très important de considérer que ces spécificités ne s’opposent pas, et que l’on doit considérer, comme l’a écrit Canguilhem, qu’il y a une continuité entre le Normal et le Pathologique, qui nécessite de penser l’aspect psychothérapique comme étant inclus de lui-même.
La multiplicité des écoles et les diverses théories – parfois en partie opposées – qui la sous-tendent, ont rendu la psychanalyse populaire en Europe et dans certaines parties du Monde, comme en Amérique du Sud (et notamment en Argentine), mais aussi controversée sur certains de ses aspects théorico-cliniques, ou encore physiologiques et biologiques notamment suite à l’avènement des neurosciences et de l’imagerie médicale.
La difficulté de valider scientifiquement la psychanalyse
La complexité sous-jacente à la psychanalyse, dont l’objet de travail est “la psyché” (et notamment la conflictualité psychique liée aux désirs inconscients du sujet), ainsi qu’une grande variabilité théorico-clinique, sont à l’origine d’une difficulté (admise par tous et notamment par les psychanalystes eux-mêmes) à la question de sa validation scientifique. On ne peut pas conclure de cette difficulté une invalidation (et ce serait une erreur de le faire), mais il faut admettre que celle-ci a joué et joue toujours en sa défaveur. Toutefois, les psychanalystes, souvent issus, comme Freud, du monde des médecins, ont toujours montré une forte rigueur intellectuelle, et il ne faut pas oublier que tout psychanalyste est forcément passé par – au moins – un divan.
La psychologie clinique tient compte de la psychanalyse
Ceci d’ailleurs permet de comprendre qu’être psychanalyste n’est pas exclusif de la profession de psychologue ou de psychiatre, ce qui est très important. La psychologie clinique, notamment, utilise des notions propres à la psychanalyse, et il serait donc erroné de vouloir catégoriser ces entités en les excluant, bien que ce soit un peu ce que nous faisons dans cet article par souci de clarté.
La psychanalyse en mal de reconnaissance.
En tous cas, la difficulté d’évaluer les résultats cliniques obtenus par l’intermédiaire de l’application personnelle (et/ou institutionnelle) de la psychanalyse explique en partie pourquoi, au moment de la réglementation sur l’obtention du titre de psychothérapeute entre 2010 et 2012, les psychanalystes n’ont pas été d’emblée reconnus comme psychothérapeutes, alors que les psychiatres, puis les psychologues, ont rapidement obtenu ce statut du fait de la reconnaissance officielle de la qualité de leur formation (qui inclut une formation à la recherche clinique appliquant la méthode scientifique).
Il est par ailleurs important de noter que même si l’Etat ne donne pas automatiquement le titre de psychothérapeute aux psychanalystes, les systèmes de formation et de reconnaissance – internes aux sociétés psychanalytiques – qui mènent à l’autorisation d’exercer en tant que psychanalyste sont souvent exigeants et confèrent de ce fait aux psychanalystes de réelles compétences en santé mentale.
Les psychothérapeutes
La profession de psychothérapeute a été réglementée depuis une loi 2010. Il s’agit d’un titre qui peut être obtenu sous conditions par différents professionnels (psychiatres, psychologues, psychanalystes, autres thérapeutes). Un psychothérapeute est donc désormais un professionnel de la santé mentale habilité et reconnu. L’utilisation de ce titre certifie que le professionnel dispose de connaissances suffisantes en psychopathologie et de compétences spécifiques dans au moins une technique psychothérapique. Une remarque : les psychiatres et les psychologues cliniciens sont à peu de choses près d’emblée psychothérapeutes, parce que leur formation initiale valide les conditions légales d’obtention du titre.
Remarquons que la psychanalyse peut être considérée comme une technique psychothérapique, mais au vu de la variété des formations d’analystes et de leur plus ou moins grande exigence, les psychanalystes n’ayant pas déjà un diplôme de psychiatre ou de psychologue ne sont pas directement reconnus en tant que psychothérapeutes. S’ils désirent obtenir ce titre, ils doivent donc passer par une formation complémentaire délivrée par un organisme habilité à délivrer cette accréditation.
Un psychologue est-il psychothérapeute ?
Non, un psychologue au sens large du terme n’est pas forcément psychothérapeute. Tout dépend de sa spécialisation. S’il est psychologue du travail, il devra valider une formation en psychopathologie ainsi que des stages pour devenir psychothérapeute. Par contre, s’il est psychologue clinicien et qu’il est inscrit au registre ADELI, il pourra bénéficier du titre de psychothérapeute sans formation supplémentaire. En effet, la loi de 2010 réglemente le titre de psychothérapeute et l’attribue de plein droit aux psychiatres et aux psychologues cliniciens.
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Merci pour cet article très complet (et clair). J’aimerais ajouter, et dites moi si je me trompe, que les psychanalystes, dans la mesure où ils ne suivent pas de formation universitaire (donc n’ayant pas de “diplômes” à proprement parler), sont parfois difficiles à évaluer “sur le papier” (je veux dire qu’il peut être difficile de juger de leurs compétences a priori). Ils disposent de “titres” néanmoins, et comme vous le soulignez à juste titre, certaines écoles sont vraiment exigeantes et ont pignon sur rue, donc pour celles-ci pas de problème. Mais pour les autres ? Pensez-vous qu’il y ait ce qu’on pourrait appeler de “mauvaises écoles de psychanalyse” pa exemple ? Je ne dis pas que ce soit le cas, je pose juste la question de manière ouverte.
Bonjour,
Merci pour votre commentaire.
Celui-ci m’a conduit à reprendre le paragraphe sur les psychanalystes.
Concernant la question de l’évaluation des psychanalystes, il n’y a pas de système généralisé permettant de le faire, comme pour beaucoup de techniques thérapeutiques d’ailleurs.
On est donc contraint de se fier au sérieux des écoles, en espérant que leurs systèmes de formation et d’évaluation soient de qualité. Il me semble qu’en tous cas, on devrait pouvoir – à minima – exiger de ces écoles qu’elles aient une véritable éthique de formation, avec la présence en leur sein d’une réflexion sur ce que “devenir psychanalyste” signifie, et qu’elles mettent en place une information transparente sur les voies choisies pour la validation des psychanalystes-postulants.
Merci pour ces précisions. Il existe aussi le Psy praticien dont la profession n’est pas réglementée à ce jour.
Bonjour, merci pour votre commentaire, pouvez-vous expliquer ce que vous entendez par “Psy praticien” ?